L'Agricultural Bank of China est un peu l'équivalent local du Crédit agricole… mais avec une clientèle de 320 millions de personnes !
Derrière le bouillant carrefour commercial de Xujiahui, au sud-ouest de Shanghaï, une quinzaine de retraitées scrutent, concentrées, des écrans d'ordinateur. Comme d'autres jouent au bridge, elles consultent les cours de la Bourse et passent leurs ordres depuis cette salle de courtage de la firme Xingye. Le calme qui règne ne dit rien de ce qui se prépare à la Bourse chinoise : peut-être la plus grande introduction en Bourse de l'histoire, si l'Agricultural Bank of China (AgBank) parvient à son objectif de récolter 22,1 milliards de dollars, en faisant son entrée aujourd'hui et demain sur les marchés de Shanghaï et de Hongkong. Le record mondial est détenu depuis 2006 par une autre banque chinoise, ICBC (21,9 milliards).
Dernière des quatre grandes banques d'État à être cotée, l'Agricultural Bank of China est un peu l'équivalent local du Crédit agricole… mais avec une clientèle de 320 millions de personnes, soit davantage que toute la population américaine ! Les investisseurs étrangers semblent prêts à souscrire massivement à l'opération, y voyant l'opportunité de mettre un pied sur un marché colossal. Les fonds sou-verains du Qatar et du Koweït prendront 3,8 milliards de dollars de participation. Standard Chartered Bank, Rabobank ou encore le milliardaire hongkongais Li Kashing font aussi partie des intéressés.
Accès aux campagnes :
En revanche, les Chinois eux-mêmes semblent bouder l'offre. Chez les petits porteurs de Shanghaï, l'événement ne déchaîne pas les passions. «Je n'ai pas acheté de titres. J'ai déjà des actions de la China Construction Bank, ça me suffit», tranche Tang Xiuqi, sexagénaire un peu échaudée par les dernières performances du marché. Sur les 15.000 euros qu'elle a placés, elle en a perdu 4000. Brushing impeccable et grosses lunettes sur le nez, Mme Zhu, elle, saisit toutes les occasions. «J'ai acheté 1 000 actions, mais je suis la seule de mon entourage», reconnaît-elle.
Elle a pourtant parcouru du chemin en seulement dix ans, lorsque le premier ministre de l'époque, Zhu Rongji, décida de mener une grande réforme dont l'ultime étape serait l'introduction en Bourse. Restructuration, injection de capital, tout fut mis en œuvre pour faire d'Agricultural Bank un établissement présentable aux marchés.
Sur les deux dernières années, son taux de créances douteuses est passé de 4,3 % à 2,9 %. Mais le chiffre reste encore bien au-dessus de la moyenne des banques chinoises, à 1,5 %. Paradoxe, si elle pèse sur ses chiffres, son implantation dans les campagnes fait aussi sa force, sur un marché en pleine expansion. «Elle a très bien su se vendre et met en avant son accès à la Chine rurale, qui a un grand potentiel» , note Todd Martin, analyste pour la Société générale à Hongkong, qui prévoit un bon démarrage pour l'établissement. Même s'il n'a pas encore précisé sa stratégie à venir pour profiter du boom des campagnes chinoises.
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