Zone euro : vers un consensus à l'arraché.
Plusieurs capitales, dont Paris, mettent aussi sur
la table une proposition de taxe bancaire, assise sur les revenus de
chaque banque européenne (produit net bancaire).
Une forme panachée de mise à contribution des banques au plan d'aide à la Grèce sera sur la table des chefs d'État européens jeudi.
À 48 heures du sommet européen exceptionnel qui sera consacré jeudi à
«la stabilité financière dans la zone euro» et au «programme d'aide à
la Grèce», la
tension restait extrêmement forte mardi dans les chancelleries, les
salles de marchés et les quartiers généraux des institutions
financières. D'autant qu'Angela Merkel a encore une fois entretenu le
doute mardi: «Il n'y aura pas de grande avancée spectaculaire d'un coup,
pas demain, pas jeudi »,a-t-elle mis en garde. Une façon de dire que
l'Europe ne s'engagera pas dans un grand saut fédéraliste demain, mais
qu'elle se cantonnera au traitement du cas grec. Nicolas Sarkozy et la
chancelière, qui s'est entretenue mardi matin avec Barack Obama, se
rencontreront ce mercredi après-midi pour préparer cette réunion. Ils
dîneront ensuite et le président français quittera Berlin, jeudi matin,
pour se rendre à Bruxelles.
Pour le seul sauvetage de la Grèce en tout cas, vu des investisseurs et
des banquiers, le report d'une décision n'est pas envisageable, pas
plus que la conclusion d'un accord a minima qui attiserait le feu sur
les marchés. Le FMI a exhorté mardi la zone à produire «un plan d'action
cohérent». Mais, du côté des politiques cependant, la recherche du
consensus reste ardue. À preuve, selon nos informations, une discrète
réunion des ministres des Finances de la zone euro a failli se tenir
mardi avant d'être annulée. Depuis dimanche, les termes de la
discussion qui aura lieu jeudi sont fixés. Les négociations menées à un
rythme inédit entre financiers privés et autorités publiques en Europe
ont débouché sur un document intitulé «proposition pour une initiative
de long terme». Ce texte formule une réponse technique à l'exigence
politique de Berlin: faire participer le secteur privé à l'effort
européen en faveur de la Grèce, dans le cadre du second plan de
sauvetage qui doit lui allouer 90 milliards d'euros supplémentaires sur
la période 2011-2014. Concrètement, il propose que tous les créanciers
privés d'Athènes puissent choisir entre trois options: échanger leurs
créances contre de nouvelles obligations à 5 ans, participer au «plan
français» initial qui prévoit de nouveaux crédits à Athènes à 30 ans, ou
vendre leurs créances sur la Grèce à 60% de leur valeur faciale lors
d'une opération de rachat que financerait le Fonds européen de stabilité
financière (FESF).
Cette solution panachée signifie que l'Europe prendra le risque d'un «défaut sélectif» de la Grèce.
En tablant sur le fait que son consensus politique permettra de fléchir
la position de la BCE et convaincra les marchés que le défaut de la
Grèce sera cantonné dans le temps.
Une taxe bancaire:
Plusieurs capitales, dont Paris, mettent aussi sur la table une proposition de taxe bancaire,
assise sur les revenus de chaque banque européenne (produit net
bancaire). Une idée «étrange», ironisait mardi François Pérol, le patron
du groupe BPCE et président de la Fédération bancaire française (FBF).
La Fédération allemande des banques s'y est opposée elle aussi: si taxe
il y a, elle devra «s'appliquer à tous les concitoyens»,
argumente-t-elle. De fait, il n'est pas impossible qu'outre-Rhin, une
taxe bancaire dédiée au renflouement grec pose un problème
constitutionnel.
Selon François Pérol, la solution des problèmes
grec, irlandais et portugais est à la portée de l'Europe: les trois pays
pèsent moins de 10% du PIB de l'Union, première économie mondiale! Ce
qui manque, c'est la cohésion politique. Jeudi, les dirigeants de la
zone euro devront «parler d'une seule voix, une seule fois, pour dire
clairement quelle est leur stratégie», plaidait mardi le banquier
français.
Un de ses confrères, en privé, ne décolère pas: «On est
en train de saccager la monnaie européenne, alors que nous avions
l'opportunité d'en faire une grande devise, face au dollar dont
l'hégémonie commençait justement à être battue en brèche! Entre la
baisse des actions européennes et la hausse des taux d'emprunts, cette
crise a déjà eu un coût astronomique. Dans le meilleur des cas, celui où
les États trouvent bien un accord jeudi, il nous faudra dix ans, vingt
ans peut-être pour reconstruire la crédibilité de l'Europe».
Derrière
la Grèce, c'est la situation des «grands» pays d'Europe du Sud qui
inquiète: le bond enregistré par les taux italiens et espagnols - Madrid
a emprunté mardi 3,8 milliards d'euros à un an au taux de 3,76%, un
point de plus qu'il y a un mois - devient insupportable. Et la fermeture
du marché obligataire pour leurs banques ne peut pas durer. Nul n'est à
l'abri: l'écart de taux entre la France et l'Allemagne a atteint mardi
son niveau le plus élevé depuis 1995.
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