David Cameron et Angela Merkel, jeudi à Davos.
La chancelière et le premier ministre britannique se sont retrouvés à Davos.
Angela Merkel est totalement d'accord avec David Cameron
sur sa conception de l'Europe. La priorité essentielle devrait être la
compétitivité et le libre-échange. On a assisté à un spectacle
apparemment surréaliste jeudi après-midi, à la tribune du Forum de
Davos, en Suisse. La chancelière allemande a cité à plusieurs reprises
le premier ministre britannique, pour louer ses propositions en faveur
de profondes réformes structurelles, et à aucun moment elle n'a fait
allusion ni de près ni de loin au projet de référendum sur l'Union
européenne outre-Manche!
«David Cameron a déjà parlé de la compétitivité. C'est la question
centrale en Europe», a souligné à plaisir la chancelière. «Alors que
l'Europe regroupe 7 % de la population mondiale et 25 % du PIB du monde,
ses dépenses sociales en représentent 50 %. On ne pourra défendre notre
système social qu'en étant innovateur», a-t-elle martelé, reprenant des
chiffres qui lui tiennent manifestement à cœur.
La «dame de fer» allemande a rebondi sur une autre suggestion de son
homologue britannique: «Le libre-échange est essentiel pour la
croissance. L'Allemagne est d'accord pour que l'Union européenne signe
des traités commerciaux bilatéraux avec le Canada, le Japon et les pays
de l'Asean (Association des nations de l'Asie du Sud-Est). De même, et
après de multiples tentatives avec les États-Unis, il serait bon
d'entamer des négociations. Certes l'agriculture constitue un obstacle,
mais il est surmontable.» En tant que première économie exportatrice de
produits industriels au monde, ex aequo avec la Chine, l'Allemagne a
toujours milité à la fois pour le marché unique européen, dont la
création remonte à 1992, et pour une Europe la plus ouverte possible à
la concurrence internationale.
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En l'absence des Français…
Ce sont précisément les deux points que David Cameron entend défendre
à tout prix. Intervenant quelques heures dans la même enceinte de
Davos, il avait tenu à rappeler que le Royaume-Uni a été l'initiateur du
«grand marché intérieur», et l'idée en revient à Margaret Thatcher.
Quant au grand marché de libre-échange transatlantique dont Londres et
Berlin ont toujours rêvé, «il permettrait de créer 2 millions d'emplois
en Europe», selon lui.
En revanche, Cameron n'a pas caché les inquiétudes que lui inspire
l'euro, «et tout ce que cela implique, l'union bancaire et bien d'autres
conséquences pour un pays qui n'y participe pas et n'y participera
jamais». Mais là aussi Angela Merkel a tenu à le rassurer. «On examine
toutes les formes de renforcement de surveillance des banques pour les
pays qui ne sont pas dans l'euro», a-t-elle promis.
La première et la troisième économie de l'Union européenne veulent
converger. «Le moment est venu de revoir l'Europe comme un moteur de
croissance et non comme un motif de plainte pour nos concitoyens»,
insiste David Cameron. Et Angela Merkel d'ajouter: «Les États nationaux
doivent s'engager avec la Commission européenne pour améliorer leur
compétitivité.» Et la chancelière d'insister: «C'est le moment pour les
réformes structurelles.»
Face à ce nouveau couple, la France pourrait se sentir encerclée.
Mais aucun ministre français n'est encore arrivé à Davos. Pierre
Moscovici, le ministre des Finances, ne doit y faire qu'une brève
apparition ce vendredi où il doit s'exprimer sur un sujet relativement
technique, à savoir «l'abondance de liquidités créées par les banques
centrales» et leur impact sur la croissance.
En revanche, la pléiade de premiers ministres européens présents au
Forum ont reconnu le bien-fondé des recommandations britanniques, tout
en prenant leurs distances avec le référendum.
«L'Europe est fondée sur le marché unique, mais il n'y en a pas pour
l'énergie ni pour les services numériques», a regretté Mario Monti, qui
dans une vie antérieure a été commissaire européen à la Concurrence. «Il
faut terminer le marché unique», a-t-il insisté, soutenu par son
homologue danoise. «Il faut engager des négociations commerciales avec
les États-Unis», espère Enda Kenny, le premier ministre irlandais dont
le tropisme atlantique est avéré. L'Europe sera libérale ou déclinera?
Le débat est lancé.
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