L'État sera en première ligne pour conduire les entreprises françaises à l'international.
D'ici à quelques semaines, la filière nucléaire française sera fixée sur son sort. C'est en effet courant avril que François Roussely, l'ancien président d'EDF, doit rendre son rapport sur la meilleure articulation possible, essentiellement à l'international. Un rapport demandé à la fin de l'année dernière par Nicolas Sarkozy, ulcéré par l'échec du consortium tricolore constitué d'EDF, GDF Suez, Areva et Total - lors de l'appel d'offres à Abu Dhabi. Il l'a encore rappelé voici quelques jours dans un entretien au Figaro Magazine.
Certes, les travaux de la commission Roussely ne sont pas encore définitivement terminés. Il n'empêche, de grandes tendances commencent déjà à s'esquisser, et elles sont très significatives, notamment sur trois points. Le premier porte sur l'État qui supervisera activement la politique nucléaire civile à l'international. Sous quelle forme ? Le rapport Roussely devrait préconiser la création d'une haute autorité, voire d'un comité stratégique, chargés de piloter la filière. Cet organisme serait directement rattaché au premier ministre, sous contrôle étroit de l'Élysée.
Précision notable : l'outil existe déjà, même s'il n'est guère actif. Il s'agit du « Conseil de politique nucléaire », institué par décret voici quasiment deux ans jour pour jour et qui remplace le Conseil de politique nucléaire extérieur créé en 1976. Présidé par le président de la République, ce conseil «définit les grandes orientations de la politique nucléaire et veille à leur mise en œuvre (…). Pour le moment, les industriels ne sont pas représentés dans ce conseil, «mais rien n'interdit qu'ils viennent plancher avec les pouvoirs publics», souligne un bon connaisseur du secteur. Concrètement, ce conseil examinera les projets nucléaires des pays étrangers et pourrait décider de la constitution de l'équipe de France qui y participerait selon l'origine et la nature des demandes. Elles sont très différentes. Certains clients souhaitent de l'ingénierie. D'autres, la construction clé en main de centrales, voire même leur exploitation, comme ce fut le cas d'Abu Dhabi.
EDF en tête :
Deuxième point : les industriels. La commission Roussely devrait affirmer la prééminence d'EDF sur la filière, au nom de l'expertise connue et reconnue de l'électricien, qui exploite aujourd'hui la totalité du parc de centrales en France. Toutefois, il sera explicitement cité que d'autres opérateurs doivent jouer un rôle clé, à commencer par GDF Suez. Aux yeux de la commission Roussely, non seulement EDF n'a pas les moyens, humain et financier, de répondre à l'intérêt de tous les pays pour l'atome civil, mais surtout la filière française doit élargir son offre de produits. Or pour le moment, EDF ne dispose que de l'EPR en catalogue. De la même manière, la commission Roussely invitera EDF à ne pas travailler uniquement avec Areva. On remarque que la semaine dernière, EDF a engagé des discussions avec Rosatom, fabricant russe de réacteurs.
Dernier point enfin, et non des moindres, l'avenir d'Areva. La commission Roussely devrait préconiser le modèle intégré d'Areva, présent tout au long de la filière - de l'exploitation des mines d'uranium au retraitement du combustible usé en passant par la construction de réacteurs. Ces dernières semaines, des rumeurs avaient circulé autour de l'hypothèse d'un possible démantèlement du groupe dirigé par Anne Lauvergeon. La commission Roussely juge que ce modèle a fait ses preuves et estime aussi sans doute qu'un gigantesque Meccano industriel serait beaucoup trop compliqué à mettre en place. En revanche, après les difficultés rencontrées lors de la construction de l'EPR finlandais, Areva devrait voir son rôle se limiter à celui de fournisseur auprès du groupe maître d'ouvrage, EDF en tête.
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