Le premier emprunt important de la France sur les marchés depuis l'élection de François Hollande était attendu avec une certaine appréhension. Mais au vu des résultats de ce mercredi, les inquiétudes au sujet d'une attaque spéculative contre la France s'avèrent infondées pour le moment. L'Agence France Trésor (AFT) a emprunté, mercredi, un peu plus de 9,1 milliards d'euros dans des conditions historiquement favorables. En particulier, l'AFT a émis 3,65 milliards d'euros à 5 ans au taux record de 1,72%, le plus bas niveau jamais enregistré depuis la création de l'euro.
«Il n'y a aucune inquiétude des investisseurs à l'égard de la dette française», assure Raoul Salomon, responsable des relations avec le Trésor chez Barclays Capital. «La victoire de François Hollande n'était pas une surprise et avait été intégrée depuis des semaines dans les cours: la seule chose qui aurait pu créer un décalage aurait été une déclaration malencontreuse de sa part sur les déficits, mais il n'y en a pas eu.»
Pas plus que la perspective de l'arrivée de la gauche au pouvoir, la perte du AAA, mi-janvier, aura également été sans impact. Sur les 5 premiers mois de l'année, l'AFT a émis à un taux moyen de 2,25%, contre 2,53% en 2010 et 2,80% en 2011. Avec les adjudications de mercredi, la France a d'ores et déjà réalisé 54% de son programme d'émissions 2012 fixé à 178 milliards d'euros.
«Inquiétude des marchés»:
Pour autant, l'horizon global de la dette française n'est pas stabilisé. D'abord parce que si la France a emprunté à des taux historiquement faibles, au même moment, mercredi, l'Allemagne a émis une obligation au taux de 1,47% sur… dix ans! De fait, l'écart de rendement entre l'OAT et le Bund allemand évolue désormais aux alentours de 140 points de base. Un niveau élevé, même s'il est loin des records - 190 points de base - atteints en novembre 2011.«Cet écart ne reflétait pas fondamentalement les inquiétudes des marchés sur la gestion budgétaire de la France, détaille Raoul Salomon. Il s'expliquait d'abord par le fait que les investisseurs institutionnels, comme les assureurs, qui ont enregistré une dégradation de la valeur comptable de leurs actifs italiens ou espagnols l'été dernier, ont été contraints de vendre de la dette française pour compenser. Ceci sur fond de décollecte importante de capitaux dans l'assurance-vie ayant réduit leurs capacités d'achat.»
Autre faiblesse structurelle de la France: «le taux de détention de sa dette par les investisseurs étrangers, de l'ordre de 60%», relève Emeric Challier, dirigeant de la société de recherche économique et financière Oaks Field Partners. «Ceci l'expose particulièrement à l'analyse qui sera faite de sa gestion budgétaire. À titre d'exemple, la dette italienne est détenue à 30% par les investisseurs étrangers.» Pour Emeric Challier, enfin, l'exposition de la France a un éventuel défaut de la Grèce, d'un montant de 70 milliards euros, constituera un motif de pression récurrent tant que la situation ne sera pas clarifiée dans la zone euro.
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