Carlos Ghosn, PDG de l'alliance Renault-Nissan.
Alors que le groupe va supprimer 7500 postes, le leader de la CFDT, Laurent Berger, estime que son patron privilégie Nissan.
La critique est récurrente depuis quelques années. Alors que la direction de Renault prévoit de supprimer 7500 emplois en France d'ici à 2016, c'est cette fois Laurent Berger, le numéro un de la CFDT, qui a accusé lundi Carlos Ghosn, PDG de Renault et de Nissan, de privilégier le constructeur japonais par rapport à son allié français.
Le
leader syndical remet même en cause la légitimité du double patron à la
tête du groupe au losange. «Il faut s'interroger sur la possibilité
pour Renault d'avoir un PDG qui soit plus performant dans la stratégie
de Renault», sur laquelle il y a «un vrai problème», a-t-il ajouté.
Selon Laurent Berger,
Carlos Ghosn, «quasiment inaccessible», «aurait plutôt tendance» à
avantager Nissan, détenu à 43,4% par le groupe français. En conclusion,
il appelle l'État, actionnaire à 15%, à «prendre ses responsabilités sur
le dossier de Renault».
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Mais le gouvernement a de nouveau pris la
défense de la direction de Renault. «On n'en est pas à demander le
départ de tel ou tel: on est là pour construire, pas pour démolir», a
souligné Jean-Marc Ayrault,
lors d'un déplacement à Saint-Nazaire. «Ce que nous souhaitons, c'est
que les dirigeants de ces groupes automobiles disent clairement quelle
est leur stratégie de développement», ce qui «n'est pas toujours le
cas», a-t-il nuancé.
Un moindre mal:
Quelques jours plus
tôt, le gouvernement s'était déjà montré compréhensif face aux
suppressions d'emplois annoncées chez Renault, qui représentent pourtant
près de 17% des effectifs français. Arnaud Montebourg, ministre du
Redressement productif, a jugé le plan acceptable dans la mesure où il
n'y avait ni licenciements ni fermetures d'usines, mais essentiellement
des départs à la retraite non renouvelés. L'été dernier, il avait
fustigé PSA, qui avait annoncé un plan de 8000 suppressions de postes.
Si l'on ajoute à ce plan de départs volontaires celui amorcé début 2012,
plus les départs à la retraite non remplacés, ce sont 11.200 postes,
soit là encore près de 17% des effectifs, qui vont être détruits par PSA
en France.
On comprend toutefois que le plan de Renault puisse
constituer un moindre mal pour le gouvernement, qui aurait eu du mal à
défendre une nouvelle fermeture de site ou même un plan de départs
volontaires dans un groupe dont il est l'actionnaire. Il faut toutefois
préciser que Renault, dont les ventes se sont effondrées en Europe, est
dans une meilleure situation financière que PSA - dont la survie est
menacée - grâce à son dynamisme à l'international et à son alliance avec
Nissan.
Écart de performance:
Les critiques contre Carlos
Ghosn ne sont pas nouvelles. Après la fausse affaire d'espionnage, en
2011, le précédent gouvernement avait reproché au PDG de Renault de
s'être davantage attelé au développement de Nissan qu'à celui de la
marque au losange. Alors que les ventes mondiales de Renault et de
Nissan atteignaient 2,4 et 2,7 en 2002, celles du français se sont
limitées à 2,5 millions de voitures l'an dernier, tandis que le japonais
prévoit d'en écouler le double (5,1 millions de véhicules) pour l'année
fiscale se terminant en mars 2013.
Cet écart de performance
s'explique largement par le fait que Nissan est présent sur les deux
premiers marchés de la planète, la Chine et les États-Unis - qui sont
aussi les plus rentables -, alors que Renault n'y est pas implanté. «Il
n'y a pas un salarié de Renault qui ne pense pas que Carlos Ghosn ne
privilégie pas Nissan par rapport à Renault. Et il n'a jamais voulu
démontrer le contraire en arbitrant en faveur de Renault», estime un
cadre. «Nissan est venu s'installer récemment au Brésil et en Russie,
deux zones où nous étions forts, alors que nous ne sommes toujours pas
implantés en Chine et aux États-Unis», renchérit Dominique Chauvin,
délégué syndical CFE-CGC de Renault.
«C'est quand même nous qui
avons mis beaucoup d'argent pour sauver Nissan. Ils pourraient
maintenant faire un geste en retour en investissant dans nos usines en
France», poursuit une source interne. Renault a indiqué que Nissan
pourrait attribuer des véhicules aux sites français en cas d'accord de
compétitivité avec les syndicats français.
Du côté de la direction
du constructeur, on met en avant les économies d'échelles réalisées
avec le japonais. Et d'assurer qu'il «n'est pas question de privilégier
l'un ou l'autre des partenaires».
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