L'organisation économique internationale, en pointe dans la lutte contre les paradis fiscaux, s'attaque aux pratiques d'optimisation fiscale des multinationales. Elle compte modifier les règles internationales en vigueur.
L'OCDE lance
une nouvelle fronde contre l'évasion fiscale. Cette fois, il ne s'agit
plus de traquer les avoirs des personnes physiques cachés dans les
paradis fiscaux. L'organisation s'attaque aux tours de passe-passe des
multinationales qui leur permettent, en toute légalité, de localiser des
profits dans des juridictions peu ou pas taxées, afin d'échapper à
l'impôt sur le lieu de leur activité. Plusieurs entreprises - Google,
Amazon, Apple ou Starbucks - sont visées.
L'organisation
internationale agit dans un contexte politique très favorable. Tous les
grands pays avancés, États-Unis en tête, sont confrontés à de graves
problèmes budgétaires.
C'est à l'occasion du prochain G20 Finances,
à Moscou les 14 et 15 février, que l'OCDE exposera son projet avant de
présenter, en juillet ou en septembre, un plan d'action détaillé. Une
fois n'est pas coutume, les pays développés peuvent compter sur le
soutien des grands pays émergents - l'Inde, la Chine, le Brésil, la
Russie -, qui se plaignent depuis des années de ne pouvoir tirer profit
sur le plan fiscal de la présence des groupes étrangers sur leur sol.
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Coquilles vides:
Si
l'OCDE privilégie l'enceinte du G20 pour pousser ses pions, c'est pour
contourner la résistance de petits États européens comme la Suisse, le
Luxembourg ou même l'Irlande, qui affiche l'une des plus faibles
impositions sur les sociétés à 12,5 %. Sachant qu'en matière fiscale, la
règle de l'unanimité s'applique dans l'Union européenne qui autorise de
facto le dumping fiscal.
L'objectif de l'OCDE n'est pas de
relever les taux d'imposition. Au contraire. «Des taux bas, c'est mieux
pour la croissance. Mais encore faut-il pouvoir collecter l'impôt!» note
un expert fiscal de l'organisation. L'objectif de l'organisation est de
changer les règles en vigueur qui favorisent les pratiques
d'optimisation fiscale en toute légalité.
Le schéma de base consiste à localiser les produits de vente dans des coquilles vides installées dans des paradis fiscaux.
C'est la fameuse technique des «prix de transfert». Si toutes les
multinationales y ont recours, la pratique a explosé avec l'envolée du
secteur numérique, qui se passe d'activité physique, et tirent leur
profit de droits de propriété intellectuelle, facilement délocalisables.
L'exemple caricatural, c'est Google: une maison mère aux États-Unis,
une filiale européenne installée en Irlande, des royalties versées aux
Pays-Bas avant d'atterrir aux Bermudes. Résultat, un impôt quasi nul, et
pas un dollar pour le pays d'origine, les États-Unis, où le rendement
de l'impôt sur les sociétés ne dépasse pas 10%.
Les États veulent
changer les règles pour empêcher que la fiscalité ne soit déconnectée de
l'activité réelle. Pour empêcher que Google ne paye que 4% d'impôt en
Europe. Parmi les réformes envisagées figure l'interdiction des sociétés
qui ne sont reliées à aucune activité physique.
Autre piste: «neutraliser» les sociétés hybrides qui permettent une double nationalité fiscale. Ainsi pour les États-Unis Google Europe est
une société irlandaise; mais en Irlande, c'est une société des
Bermudes. L'OCDE souhaiterait rassembler ces nouvelles règles dans une
convention internationale, signée par un maximum d'États, qui
s'imposerait ensuite aux législations nationales.
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