François Hollande, jeudi à Bruxelles.
La chancelière allemande se pose en arbitre entre le président français et le premier ministre britannique.
L'Europe a engagé dans la nuit un bras de fer tendu sur ses dépenses jusqu'à la fin de la décennie. Avec la chancelière Angela Merkel en arbitre entre les «parcimonieux» menés par David Cameron et les partisans d'un soutien résolu à la croissance conduits par François Hollande.
Les
vingt-sept dirigeants ont entamé leur sommet avec près de six heures de
retard. Ils doivent s'entendre à l'unanimité sur un budget 2014-2020
oscillant autour de 915 milliards d'euros. La nuit s'annonçait longue et
difficile. Les tractations, où chaque pays défend son intérêt national
en invoquant un « juste retour», risquent de se prolonger, peut-être
jusqu'à samedi.
Décrivant un exercice de haute voltige, la
chancelière allemande a dit sa volonté de «faire attention à la dépense»
tout en ménageant «la solidarité entre le nord et le sud de l'Europe».
Les positions des uns et des autres restent «encore assez éloignées». En
fin de soirée, Berlin a évoqué un risque d'échec. Signe de tensions, le
maître de séance, Herman Van Rompuy, a renoncé à présenter une
proposition chiffrée de compromis à l'ouverture du sommet. Il
l'envisageait au mieux dans la nuit, après un premier tour de table.
François
Hollande, chef de file d'un groupe de pays en passe difficile, comme
l'Italie et l'Espagne, n'a pas exclu l'échec. «Je viens chercher un
accord, encore faut-il qu'il soit possible, dit-il. Il n'y aura pas
d'accord sur compromis qui négligerait les politiques (traditionnelles)
de l'Europe, abandonnerait l'agriculture et ignorerait la croissance.»
Sans citer le premier ministre britannique, il veut «faire en sorte de
raisonner» ceux qui ne seraient pas raisonnables.
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Face à lui,
David Cameron affirme que les chiffres avancés «doivent redescendre, et,
si ce n'est pas le cas, il n'y aura pas d'accord». Le Royaume-Uni peut
compter sur le soutien appuyé de ses alliés traditionnels sur les
questions d'argent, la Suède, les Pays-Bas et la Finlande.
D'autres
pays, l'Autriche, la Hongrie et la Slovaquie, ont abordé le rendez-vous
sur des positions très fermes. Seul le premier ministre tchèque, Petr
Necas, s'est dit prêt à user de son veto, arme absolue de tractations
budgétaires qui nécessitent l'accord de tous. Les positions initiales,
aussi entières qu'elles paraissent, n'impliquent pas l'échec. Paris a
tracé des lignes rouges, sans avancer d'exigence nouvelle. Londres veut
des coupes supplémentaires par rapport à novembre, mais le principe en
est déjà accepté par tous.
C'est la seconde fois que l'Europe
donne un coup de rabot historique à ses ambitions. En novembre, sans
conclure, elle avait réduit de 987 à 935 milliards l'addition initiale
de la Commission (crédits de paiements). Jeudi, la forte opposition de
la France et de l'Italie semblait retenir le président Van Rompuy de
descendre jusqu'à 905 milliards, comme le souhaite le Royaume-Uni. Le
point d'équilibre semblait se situer plutôt entre 910 et 920 milliards.
Le budget de l'Union européenne ne pèse que 1 % du PIB des Vingt-Sept,
contre 20 % environ pour le seul budget de l'État en France.
François
Hollande, soucieux «de faire des économies, mais sans affaiblir
l'économie», veut limiter la casse pour les crédits de la politique
agricole commune, dont la France est la première consommatrice. Pour
faire passer cette potion amère, un «geste» de plusieurs centaines de
millions d'euros pourrait être fait en direction de Paris. Avec
l'Italien Mario Monti, le chef de l'État veut aussi préserver des
enveloppes porteuses de croissance et d'emploi, comme la recherche et
les grands chantiers transfrontaliers (énergie, transports et
télécommunications). Dans l'offre initiale, ces budgets chuteraient de
près de moitié.
Le président Van Rompuy a prévu une autre
indulgence, à destination des pays et des régions d'Europe les plus
touchés par le chômage: une «initiative pour l'emploi des jeunes»,
peut-être dotée de 5 milliards en faveur de l'Espagne, de la Grèce, de
l'Italie et du Portugal.
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