Au Salon de l'automobile de Detroit (Michigan) - qui s'ouvre lundi 11 janvier aux professionnels et aux médias, puis du 16 au 24 janvier au grand public -, tous les participants auront sans doute le même souhait : que 2009 soit reléguée au rang de mauvais souvenir, même si cette année restera forcément dans les annales comme la pire pour l'industrie automobile américaine.
Avec 10,4 millions de voitures vendues, le marché américain a chuté de 21 % par rapport à 2008 et a réalisé sa pire performance depuis près de trente ans. C'est même plus d'un tiers de moins que la moyenne des ventes réalisées entre 2000 et 2007 ! Résultat : le marché automobile s'est fait rafler la place de numéro un mondial par la Chine. Les 4 × 4, que les Américains jugent trop gros, trop polluants et trop gourmands en carburant, ont poursuivi leur chute (- 24 %). Pire, la production a plongé de 35 %.
Les trois constructeurs américains - General Motors (GM), Ford et Chrysler - se souviendront longtemps de 2009. Car ce qui semblait inimaginable est arrivé. A force de ne pas vouloir écouter leurs clients et engager les réformes nécessaires - stopper les rabais et crédits gratuits, réformer les systèmes de retraite et de dépenses de santé des salariés... -, GM et Chrysler ont dû déposer le bilan malgré les dizaines de milliards de dollars injectés par l'Etat américain.
Le premier a été nationalisé, sommé de rétrécir en vendant des marques (Hummer), en en arrêtant certaines (Pontiac) et en fermant des usines (11 sur 47). Le deuxième a été racheté par l'italien Fiat. Ford est le seul à avoir passé la crise sans avoir reçu le soutien de l'Etat.
La réalité est là : ceux qu'on appelle désormais les "Detroit Three" (les "trois de Detroit"), et non plus les Big Three, n'en finissent plus de perdre des parts de marché. Ils ne représentent plus que 44,6 % du marché américain (48,1 % en 2008, 69,7 % en 1999). Pour la première fois, les constructeurs asiatiques (Toyota, Honda, Nissan, Hyundai...) ont dépassé les américains, avec environ 47 % de parts de marché.
"INDUSTRIE STABILISÉE":
Même si la reprise "ne sera pas rapide", comme le pense Karl Brauer, du site spécialisé Edmunds.com, il y a toutefois des raisons d'espérer. "L'industrie semble s'être stabilisée", estime de son côté George Pipas, spécialiste des ventes chez Ford. D'abord, Ford et GM ont prévu de relancer leur production au premier semestre 2010. Les usines de GM devraient ainsi produire 650 000 véhicules, contre 371 000 au premier trimestre 2009. Chez Toyota, pour faire face à la demande et reconstituer les stocks chez les fournisseurs, des heures supplémentaires ont été instaurées dans toutes les usines nord-américaines du constructeur nippon. Mi-décembre 2009, il a annoncé qu'il allait aussi mettre en place une deuxième équipe composée de 800 ouvriers dans son usine de Woodstock (Ontario, Canada), qui fabrique l'un de ses modèles emblématiques, le Rav4, un 4 × 4 urbain.
Parmi les autres bonnes nouvelles : Ford. Au troisième trimestre, le deuxième constructeur américain a enregistré des bénéfices - 1,1 milliard de dollars (770 millions d'euros) -, une situation inédite depuis le premier trimestre 2008.
Ed Whitacre, le nouveau patron de GM, est aussi optimiste. Il a prévu un retour aux bénéfices en 2010, prévoit de rembourser intégralement les prêts du Trésor américain d'ici à juin et de faire son retour en Bourse en juillet. Plusieurs véhicules lancés par GM en 2009 se vendent bien, comme la Chevrolet Camaro ou la nouvelle version d'un crossover Cadillac.
Enfin, même si de nombreux équipementiers sont toujours sous le "chapitre 11", le régime américain des faillites, de grands noms en sont sortis, comme Delphi ou encore Lear.
Après la centaine de milliards de dollars injectés dans l'industrie automobile, une douzaine de membres du Congrès se rendront à Detroit lundi, emmenés par l'inflexible élue démocrate Nancy Pelosi, qui s'était opposée à toute aide faute de plan viable.
Ils verront au moins deux choses. La première, c'est que les Detroit Three vont faire leur entrée sur le marché des petites voitures. Ford va vendre pour la première fois aux Etats-Unis sa Fiesta, et aussi sa nouvelle Focus tandis que GM commercialisera au troisième trimestre 2010 sa Chevrolet Cruse. Des véhicules inspirés des modèles vendus en Europe. Quant à Chrysler, le plus mal en point, la nouvelle direction compte sur le lancement de son Grand Cherokee pour 2010 et sur le renouvellement d'une dizaine de voitures lors du troisième trimestre pour enrayer la chute de sa part de marché (4 points entre 2007 et 2009).
Detroit fera évidemment la part belle aux voitures électriques. Au total, entre 30 % et 40 % de la surface du Salon devrait concerner ce type de véhicule. Tout cela laisse espérer des jours meilleurs. "Les chiffres de décembre 2009 nous font penser que le marché va repartir à la hausse", estime Xavier Mosquet, qui dirige le Boston Consulting Group à Detroit. Selon lui, il devrait atteindre 11,5 millions d'unités. A moins d'une nouvelle récession.
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