Le littoral de la commune de Ver-sur-Mer (Calvados) le 28 février dernier, lors du passage de la tempête Xynthia.
Le projet pourrait être freiné si la cartographie des risques prend du retard.
Un système d'avertissement et d'alerte au risque de submersion le long des côtes françaises devrait être mis en place à l'été 2011. «Le travail est en cours», assure Laurent Michel, directeur de la prévention des pollutions et des risques, au ministère de l'Écologie et du Développement durable. Il a été confié fin 2008 à Météo France pour la partie amont de l'alerte, tout ce qui touche à l'aléa physique : les vents, la marée, les vagues et la houle.
S'il avait déjà été mis en place et complété par une vraie cartographie des zones vulnérables, un tel système aurait permis d'alerter les populations les plus exposées de façon beaucoup plus précise et circonstanciée que ce qui a été fait dimanche dernier en Vendée et en Charente-Maritime. Pour nombre d'experts, sa mise en place est plus importante que le seul renforcement des digues constamment évoqué depuis une semaine. Beaucoup de digues ne peuvent résister à une crue centennale comme Xynthia avec une surcote de marée d'un mètre. La montée du niveau de la mer due au réchauffement le rend indispensable.
Cartographie du littoral en 3D :
Le futur système d'avertissement de Météo France va améliorer celui qui existe déjà, en renforçant la synergie avec le Shom (Service hydrographique et océanographique de la marine) et le Cetmef (Centre d'études techniques maritimes et fluviales). Il devrait permettre de prévoir l'aléa le long du littoral à l'échelle d'un département.
À la fin 2011, le Shom sera en mesure de fournir en direct les données collectées par ses marégraphes qui mesurent le niveau de la mer. Ce n'est pas le cas aujourd'hui. Les mesures des hauteurs d'eau enregistrées dans la nuit de samedi à dimanche derniers par les appareils des Sables-d'Olonne et de La Rochelle ne sont arrivées que lundi matin à Météo France. «Ces données sont importantes aussi car elles permettent de vérifier les prévisions fournies par les modèles», souligne Alain Ratier, directeur adjoint de Météo France. Le Shom dispose d'un réseau d'une vingtaine d'observatoires du niveau des mers baptisé Ronim.
Le Cetmef qui mesure les vagues avec son houlographe de l'île d'Yeu (Vendée) fournit déjà ses données toutes les heures à Météo France. Le week-end dernier, malheureusement, il n'a pas pu les transmettre en raison d'une panne électrique. En 2011, le Cetmef espère installer de nouveaux appareils en Métropole, ce qui permettra d'affiner les mesures. Son réseau de mesure s'appelle le Candhis (Centre d'archivage national de données de houle in situ).
Les prévisions de Météo France ne représentent que la partie amont de la chaîne de l'alerte. À l'autre extrémité, on trouve le ministère de l'Intérieur et la Sécurité civile, sous l'autorité du préfet, qui ont la responsabilité d'avertir les collectivités locales et de les aider à prendre les décisions adaptées. «L'alerte doit être en cohérence avec le système d'avertissement», insiste Alain Ratier.
Mais le gros problème actuellement, c'est que cette chaîne a un ventre mou. En effet, la France ne dispose pas à ce jour de carte de vulnérabilité des risques de submersion le long du trait de côte qui intègre les données physiques, l'habitat et les activités humaines. Pourquoi ? Parce que le projet de cartographie du littoral en 3D comprenant à la fois la bande côtière et son prolongement marin immédiat ne fait que commencer. Le projet est coûteux. Les cartes sont réalisées à partir des données collectées par un radar laser baptisé Lidar emmené à bord d'un avion. Le coût de Litto3D est estimé à 1,83 million d'euros, dont 550 000 € pour le Shom et l'IGN, le reste étant à la charge de l'État et des collectivités. La cartographie du Languedoc-Roussillon devrait être publiée dans le courant de cette année. Pour les autres, il faut attendre les financements, renchérit Alain Ratier.
À défaut d'une carte d'évaluation des risques solides, le BRGM (Bureau de recherches géologiques et minières) devrait bientôt sortir une carte simplifiée. C'est mieux que rien mais c'est insuffisant. «Des données précises sont indispensables pour savoir comment les vagues vont taper sur la côte et bien évaluer l'aléa», souligne Charlotte Vinchon, du BRGM, qui a fait une estimation des risques de submersion en 2100 en Aquitaine et en Languedoc.
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