Dieter Hundt, président du BDA, le patronat allemand, réclame «l'abandon de ce projet fondamentalement nuisible».
L'idée d'une prime pour les femmes gardant leurs enfants chez elles se heurte au manque de main-d'œuvre.
L'affrontement n'avait pas été aussi vif au sein du gouvernement d'Angela Merkel depuis la réforme très controversée de la Bundeswehr. La coalition de centre droit, dirigée par la chancelière, se déchire depuis plusieurs semaines à propos de la politique familiale. Le projet de loi prévoyant l'introduction d'une prime destinée aux parents élevant leurs enfants à domicile au lieu de les placer en crèche ou au jardin d'enfants, le Betreuungsgeld, provoque une vive polémique outre-Rhin. Ses détracteurs jugent que cette mesure découragera les femmes cherchant à concilier maternité et activité professionnelle, au moment où le marché allemand du travail manque déjà cruellement de main-d'œuvre.
Le projet de Betreuungsgeld est soutenu par la direction du parti conservateur de Merkel (CDU) et son alliée bavaroise, la CSU, très à cheval sur les valeurs familiales traditionnelles. En Bavière, la tradition des «trois K» (Kinder, Küche, Kirche - «enfants, cuisine, église») continue de peser lourdement sur la condition féminine. La subvention, qui devrait être comprise entre 100 et 150 euros par enfant de moins de 3 ans gardé à domicile, est censée être votée avant l'été pour une mise en œuvre prévue en janvier 2013. Les conservateurs affirment ainsi vouloir faire «preuve de cœur». «La prime sera adoptée et sans aucune concession», prévient Christine Haderthauer, ministre des Affaires sociales de Bavière.
«Prime aux fourneaux»:
Mais les détracteurs du projet sont de plus en plus nombreux au sein de la CDU et chez les alliés libéraux de Merkel, qui menacent de voter contre son adoption au Bundestag. Philipp Rösler, vice-chancelier et patron des libéraux du FDP, juge que «l'objectif consistant à favoriser la conciliation entre vie familiale et vie professionnelle» est menacé par la subvention. Syndicats et patronat sont, à l'unisson, vent debout contre le projet surnommé la «prime aux fourneaux». Dieter Hundt, président du BDA, le patronat allemand, réclame «l'abandon de ce projet fondamentalement nuisible».Ils y voient une barrière à l'entrée des femmes sur le marché du travail, un enjeu crucial pour l'Allemagne. La prime encouragerait les mères à rester à domicile pendant plusieurs années pour garder leurs enfants, compromettant ainsi leurs chances de retrouver un emploi. La dénatalité se traduit déjà par une forte pénurie de main-d'œuvre outre-Rhin. La Fédération des chambres d'industrie et de commerce allemandes (DIHK) estime le manque à 400.000 travailleurs qualifiés par an. D'ici à 2030, la population active allemande devrait diminuer d'un quart, selon ses prévisions. L'immigration, mais aussi le travail féminin sont censés compenser ce manque. Les difficultés à concilier la naissance d'un enfant et un emploi continuent de plomber le taux de fécondité outre-Rhin: avec 1,3 enfant par femme en moyenne, c'est l'un des plus faibles de l'Union européenne.
Les opposants au projet jugent aussi que la prime nuit à l'équilibre des enfants en retardant leur adaptation à la vie en société, ainsi qu'aux chances des plus défavorisés, dont l'éveil serait ainsi retardé.
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