Après 'aide à l'Espagne, les différents plans auront coûté environ 1500 euros pour chaque Français.
Si les Européens ont décidé de venir à l'aide du système bancaire espagnol, les marchés doutent encore. Ce que l'on sait déjà sur le plan en attendant les détails.
• Ce plan de sauvetage suffira-t-il?
Le chiffre de 100 milliards correspond au calcul des analystes les plus pessimistes. Le FMI mentionne des besoins compris entre 40 et 80 milliards d'euros. Ces estimations, toutefois, manquent de précision. La difficulté consiste à évaluer la dépréciation des actifs immobiliers qui infectent les bilans. C'est uniquement lorsque les banques se retrouvent contre les cordes qu'elles mettent les chiffres sur la table. C'est pourquoi le gouvernement a commandé un audit auprès de deux cabinets. Les conclusions sont attendues pour le 21 juin. Certains analystes, toutefois, craignent que les banques ne soient que «la partie visible de l'iceberg», comme l'explique Josep Maria Gay de Liebana, professeur d'économie financière à l'université de Barcelone. «Notre déficit de 2011 représente 95 milliards d'euros en 2011. Ce n'est pas un déficit ponctuel, mais chronique.» S'il fallait sauver l'économie tout entière, l'UE ne pourrait probablement pas faire face. Selon le journal El Mundo, le ministre de l'Économie, Luis de Guindos, a averti ses homologues samedi dernier. «Si vous voulez contraindre l'Espagne à un plan de sauvetage, préparez 500 milliards, puis 700 milliards pour l'Italie, qui sera la suivante!»• Les banques françaises sont-elles menacées?
Les grandes banques françaises ne sont pas menacées par le sort de Bankia. À l'exception de Dexia, elles présentent toutes des niveaux de solvabilité et de liquidités confortables. Depuis plusieurs mois, elles ont réduit leurs bilans et leurs engagements sur les pays de la zone euro considérés comme fragiles. Leurs portefeuilles de crédits souffrent du contexte économique et des difficultés traversées par les entreprises et particuliers, mais la proportion des impayés reste sous contrôle. Le taux de créances douteuses des banques françaises ne dépasse pas ainsi 1 % de l'ensemble des crédits contre plus de 8 % en Espagne, où se paie au prix fort l'éclatement de la bulle immobilière. Dans ces conditions, les banques françaises ne souffrent pas de la défiance de leurs clients. Aucune rumeur de retraits aux guichets ne les a atteints. En cas de scénarios extrêmes sur la zone euro, les institutions françaises souffriraient bien sûr des tensions sur les marchés financiers. Elles seraient alors dépendantes d'une action de la BCE.• Quel sera le rôle de la troïka à Madrid?
L'attribution de l'aide européenne est conditionnée à une refonte du système financier et bancaire espagnol. C'était la condition minimum posée par Berlin au sauvetage. Une troïka d'experts de l'Union européenne, de la BCE et du FMI veillera donc à la mise en œuvre de la restructuration bancaire. «La troïka veillera de très près à ce que le programme soit respecté», affirme Wolfgang Schäuble. Tirant les leçons de la crise du subprime aux États-Unis, il a conseillé à son homologue espagnol des Finances, Luis de Guindos: «Vous devez alimenter les banques espagnoles avec suffisamment de fonds, qu'elles le veuillent ou non!» Les médias allemands jugent que «Schäuble veut tenir l'Espagne en laisse courte». Berlin estime que la «fierté mal placée» de Mariano Rajoy a retardé le sauvetage européen.• Combien cela coûtera-t-il aux Français?
Le coût pour le contribuable français des sauvetages européens va dépendre de l'ampleur de l'aide accordée à l'Espagne, elle-même dépendante du résultat des deux audits indépendants. Si l'estimation de 100 milliards d'euros se confirme, qui devrait se faire via le Fonds européen de stabilité financière (FESF), la France y contribuera à hauteur de 20 milliards. Cette somme correspond aux garanties apportées par l'État français (quote-part de 21,8 %) si le FESF devait émettre 100 milliards d'euros de dette sur les marchés, soit un coût pour chaque Français de 300 euros. À cela, il faut rajouter le prix du renflouement de la Grèce, de l'Irlande et du Portugal. Différents économistes ont chiffré l'exposition de la France à la Grèce à près de 70 milliards d'euros, via les aides bilatérales, le FESF et les incidences sur la Banque de France, ce qui revient à 1000 euros par personne. Quant au Portugal et à l'Irlande, dont les plans d'aide s'élèvent respectivement à 78 et 85 milliards d'euros, l'engagement de la France dans le cadre du FESF s'élève à 5,7 et 3,8 milliards d'euros, ce qui fait une ardoise supplémentaire individuelle de 150 euros. À condition que ni Lisbonne ni Dublin ne fasse défaut. Cela fait donc un total d'environ 1500 euros pour chaque Français.• D'où viennent les 100 milliards pour l'Espagne?
Les détails concrets du sauvetage restent à fixer, mais il n'y a aucun doute sur qui cautionnera les 100 milliards d'euros promis à Madrid: ce sont les Trésors nationaux des 14 pays de l'euro encore valides, avec l'Allemagne et la France pour moitié. Sur le papier, il s'agira d'un crédit, avec l'espoir que les banques du royaume, ou, à défaut, les contribuables espagnols repaieront la dette à une échéance qui reste à fixer. La crise pousse à la prudence: les agences financières tordent le nez sur la capacité de Madrid à rembourser et, in fine, la caution européenne pourrait être appelée.Le FESF, fonds de secours de l'euro, juge ce scénario «très hypothétique». Jusqu'ici, tous les emprunteurs ont réglé leurs échéances - Grèce comprise. Reste que la garantie européenne est «irrévocable et inconditionnelle». Avec ce facteur aggravant que tout État qui trébuche vient rétrécir les rangs. À elle seule, l'Espagne pèse près de 12 % dans l'euro. En théorie, les 100 milliards ne coûteront pas 1 centime au fonds de secours. Ils s'inscrivent sous le plafond fixé en mars: 800 milliards de capacité de prêts. Mais ils diminuent l'enveloppe, déjà entamée à hauteur de 300 milliards. Et ajoutent aux incertitudes sur les moyens de défense de l'euro.
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